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Essaye d'utiliser ton GN (ton scenar) pour raconter une histoire.
Ou pas. Un scénario de GN, au contraire d'un livre ou d'un film, n'est pas "une histoire" que l'on raconte, mais un jeu intéractif, avec autant d'histoires terminales que de personnages. J'entends bien ce que tu voulais dire, Espigoule (voir plus bas), mais en le disant comme cela, ça fait un peu "scénario récit", dont le joueur est spectateur, et c'est un eccueil courant pour pas mal de scénaristes débutants.
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Mais, surtout, les quétes sont la conséquence de l'histoire que tu raconte et des relations qui existent entre les persos et non l'inverse.
Ou pas. C'est seulement une façon de faire et pas vraiment celle qui donne les meilleurs résultats. Je distingue deux méthodes générales pour scénariser :
- La méthode globale (c'est la tienne), consiste à concevoir une histoire et à coller les personnages dedans.
- La méthode terminale, consiste à partir des noeuds terminaux (les personnages), à imaginer ce que l'on veut faire vivre à chacun, puis à assembler tout ça dans tous le sens, en remontant jusqu'à construire une histoire globale avec.
Une scénarisation n'est pas forcement tout l'une ou tout l'autre, ça peut être les deux à différents degrés. La première méthode est plus intuitive donc plus utilisée pour une première approche de la scénarisation. La seconde est plus utilisée par des scénaristes expérimentés recherchant à construire pour chaque personnage, un jeu de qualité.
Un article un peu plus long que j'avais écris sur le sujet :
Des facettes d'une même histoire
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Ecrire un scénario de film/livre, de JdR, ou de GN sont des exercices totalement différents. Leurs difficultés, leurs pièges résident dans des aspects bien distincts. Parce que leurs finalités n'ont rien en commun, les techniques et les savoir-faire mises en oeuvre vont considérablement diverger, quand bien même on y retrouvera, ça et là, quelques points communs.
Chaque année, je vois des gens rêver d'adapter les "Dix p'tits nègres", "Battle Royal" ou tous autres récits qu'ils ont tant aimés, en Jeu de Rôles Grandeur Nature. Ma réponse est toujours la même : ce que l'on attend d'un GN n'est pas ce que l'on attend d'un roman ou d'un film. Un bon scénario de livre ne fait pas un bon scénario pour notre activité. Avant de se lancer dans la scénarisation d'un jeu, il faut bien comprendre ce que l'on cherche à faire et en quoi c'est différent de ce que l'on connaît par ailleurs.
Un scénario de livre ou de film est une histoire que l'auteur détermine jusque dans les moindres détails de son déroulement. L'histoire est narrée du prologue à l'épilogue, de l'introduction à son dénouement. L'auteur cherche à construire une narration qui accroche le lecteur/spectateur d'un bout à l'autre d'une histoire qu'il va totalement subir, avec éventuellement un message ou une morale.
Un scénario de Jeu de Rôles sur table est déjà fort différent d'une histoire romancée. Son déroulement, sa progression ne sont pas déterminés à l’avance. On ne sait pas la direction que le scénario va prendre. Le Meneur de Jeu connaît les grandes lignes et le détails des différents constituants (personnages, décors,...) mais l'action est soumise en permanence aux décisions des joueurs. Quand bien même un groupe de joueurs se séparent au cours d'une aventure, la narration du MJ comme mécanisme de jeu sérialise le déroulement du scénario et assure que rien ne se fasse réellement en parallèle. Le MJ a un regard permanent et donc une forme de contrôle sur l'évolution du scénario. On peut dire qu'il n'y a, au final, qu'une façon de percevoir le déroulement de l'histoire.
En Jeu de Rôles Grandeur Nature, non seulement le déroulement précis du scénario est non-déterminé, soumis aux joueurs, mais le mécanisme de jeu théâtral leur permet de jouer de façon indépendante, permanente et parallèle. L'organisateur n'a plus aucun contrôle direct sur l'évolution du jeu qui se passent avant tout entre les joueurs. L'action se déroule totalement librement devant lui ou même ailleurs. Du fait que l'action s'éparpille dans l'espace du jeu et se joue en parallèle, la vision de chaque joueur, comme des organisateurs, est réduite à un seul angle de vue très restreint : leurs propres yeux et donc leur compréhension des événements. Si l'on prend pour référentiel un joueur, on va suivre une histoire. Si on prend un autre joueur, on va suivre une autre histoire, subtilement ou totalement différente. Un scénario de GN a autant de facettes, autant de façon de le percevoir que de joueurs. Et c'est là toute la difficulté de l'écriture de cette forme de jeu.
Un scénario ne doit pas proposer une simple histoire à dérouler, mais autant de facettes d'une même histoire qu'il y a de joueurs, des facettes que le joueur est toujours libre d'orienter à sa guise, qui se vivent toute en parallèle, et qui prisent isolement, doivent être toutes aussi passionnantes les unes que les autres. Ecrire un scénario de GN ce n'est pas écrire une simple histoire mais écrire une histoire à 10, 20, 30 (ou bien plus) facettes ouvertes qui s'entremêlent.
L'approche "par le haut", "mécanique" ou encore "global"
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C'est la méthode la plus naturelle, la plus intuitive (souvent utilisée pour une première approche de la scénarisation). C'est aussi la plus rapide et la plus facile, car elle s'applique de façon mécanique. On part d'une idée globale du scénario (la trame générale parfois décomposée en plusieurs morceaux). On construit une liste de personnages (par exemple par stéréotype, archétype,...). On relie chaque personnage à la trame globale. On imagine quelques intrigues ou enjeux secondaires que l'on découpe et que l'on colle sur la trame majeure. On leur ajoute des interactions les unes aux autres, des informations...etc... Le synopsis d'un tel scénario peut s'écrire extrêmement rapidement (en une soirée ou en quelques jours). On commence par l'approche la plus globale et au fur et à mesure, on découpe, on précise et on relie les choses entre elles.
Exemple un peu caricatural mais tellement vrai :
Approche globale : "c'est une vente aux enchères dans laquelle se retrouvent quantités d'espions qui se disputent certains trucs." On découpe : "donc, il y a des espions américains, russes, français, des sectes anciennes et secrètes,... Les objets disputés sont un rituel ancien pour la secte, les plans d'un truc révolutionnaire pour les espions..". On stéréotype : "l'un des personnages est un scientifique, un autre médecin, un dandy,..". On colle des intrigues : "donc le scientifique américain est le petit fils de l'autre. La danseuse russe est amoureuse du lord anglais. Le dandy français est bien sur Arsène lupin." Et on rédige le tout. Ca se pond en quelques heures.
Cette méthode a cependant un certain nombre de défauts si l'on n'y prend pas garde.
Le premier c'est la tentation d'écrire un scénario et des personnages sans "âme", si on applique cette technique trop froidement. Notamment en construisant les intrigues et les personnages de façon générique, c'est à dire en collant bout à bout des intrigues indépendantes, un peu au hasard. Exemple: Il me faut une intrigue pour relier machin à bidule. Je pioche dans mon sac magique et je tire une "dette de jeux" ou tout autre chose du genre. En soit, ça n'empêchera pas le jeu de fonctionner, mais un perso écrit de façon générique, ça se voit. Le collage d'intrigues bateaux trop indépendantes les unes des autres saute aux yeux. C'est pas très plaisant pour le joueur. On a l'impression d'avoir un perso creux, artificiel, sans saveur, bâclé, sans grand intérêt, secondaire ou archi-vu. Bref, tout ça, ce n'est pas très prenant.
Le second défaut de cette méthode et pas le moindre, est de ne pas construire des situations de jeux très tripantes. En écrivant par une approche exclusivement globale, on a construit l'enchevêtrement du scénario sans penser à la façon dont il sera perçu par chaque joueur. La facette du premier paragraphe est un peu le fruit du hasard, la perception sous un angle d'une construction dessinée globalement. Or, ce qui semble le plus intéressant, c'est de s'assurer que chaque joueur va vivre une aventure passionnante, que chaque facette soit en soit une histoire prenante et unique.
L'approche "par le bas", "artistique" ou encore "terminale"
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C'est plutôt l'approche des scénaristes expérimentés. Ici, on ne cherche pas à construire une trame globale et à la préciser. On change de référentiel en commençant au contraire par les noeuds terminaux que sont les personnages. On se fiche donc dans un premier temps de la liste complète des personnages. On se fiche de la trame principale, de la cohérence des intrigues, d'intrigues en elles-memes. On liste des "situations de jeux" que l'on cherche à créer. On liste des sensations, des émotions que l'on veut faire ressentir aux joueurs. On pense à la perception du joueur (la facette) avant tout autre aspect du scénario. On recherchera seulement après une intrigue qui permet d'intégrer les "situations de jeux" que l'on a imaginé. L'intrigue se construira à partir de cela, en cherchant à assurer pour chaque joueur que le déroulement du scénario "vu par lui" sera passionnant.
Exemple: Je veux que le personnage soit plongé dés le départ dans un profond mystère, qu'il soit inquiet, qu'il ait même peur, qu'il se pose tout un tas de question. Donc, je m'imagine une scène où le joueur se reveille pratiquement nu sur une salle d'opération avec un gros mal de crâne et des souvenirs (son background) en forme de cauchemards, des souvenirs flous et une phrase qui revient tout le temps en leitmotiv "Tic Tac, c'est l'heure". Il a du sang partout sur lui. Il y a des organes découpés sur une petite table. Il ne sait pas où il est. Il a froid, il cherche des vêtements. Voila en quelques mots, une situation de jeu qui sera tripante à vivre pour le joueur, qui va lui faire ressentir tout un tas de sensations. On se fiche pour l'instant, du pourquoi et du comment, on le trouvera plus tard. Cet exemple concerne une situation initiale, mais on peut rechercher ce genre de chose de la même façon pour l'ensemble du jeu. Par exemple, je veux qu'un joueur bien vivant annonce qu'il a été tué. Je veux qu'un personnage rencontre un autre qui se fait passer pour lui. Je veux qu'un personnage se retrouve par un déguisement ou un quiproquos à tenir la place d'un autre. etc...
Le grand intéret de cette méthode, c'est de reflechir en pensant à ce que va réellement vivre le joueur, en cherchant à le faire triper par les situations de son personnage en jeu. On ne construit plus un scénario sous la forme d'une histoire littéraire où l'on colle des joueurs, mais on conçoit des élements tripants pour chaque joueur que l'on utilisera comme les briques d'un scénario. Mais il faut encore assembler tout ça de facon cohérente.
Un coup en bas, un coup en haut
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L'idéal consiste alors à d'abord rechercher des situations de jeux et des effets scénaristiques tout en les assemblant progressivement dans une trame globale. On avance ni totalement par le bas, ni totalement par le haut, mais en alternance de l'un à l'autre. Ca amène à réécrire énormement. La trame globale va en permanence changer pour répercuter les nouvelles idées, mais le final est quelque chose qui n'a rien à voir avec l'application froide de l'approche générique.
Reste que c'est extremement long. On cherche des briques qui nous plaisent et puis on les retourne dans tous les sens comme un tétris pour arriver à faire un empilement cohérent, alors que l'approche générique consiste à dessiner au fur et à mesure les briques de la bonne taille souvent bien plus fades.
L'évaluation des facettes
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Au cours de l'écriture, il est impératif de se glisser tour à tour dans chaque personnage, de se forcer à percevoir l'histoire de sa façon à lui, d'estimer ce qu'il a à faire, de l'imaginer découvrant ce qu'il y a à découvrir, d'imaginer ses intéractions avec les autres...etc... En faisant cela, on évalue la facette de l'histoire associée à ce personnage, et l'on peut se rendre compte que son implication ne semble pas suffisante, que ses perspectives de jeux ne semblent pas assez tripantes. Auquel cas, il est toujours temps de le reprendre. C'est en tout cas la meilleur facon d'éviter les "scénario-récits" , écrit en oubliant la perspective propre à chaque personnage. Un scénario est une histoire à facettes, il faut donc changer de référentiel en permanence pour l'observer de tous les angles possibles et évaluer l'état de la construction.
Frédou